La 42ème réunion annuelle des Directeurs Généraux de l'Association de Gestion des Ports de l'Afrique de l'Ouest et du Centre (AGPAOC) se tenait à Luanda en Angola du 15 au 18 novembre. Le thème central abordait la question fondamentale de l'anticipation et de l'adaptation des écosystèmes portuaires africains face aux conséquences du changement climatique. La Fondation SEFACIL a accompagné les travaux en sa qualité de conseiller scientifique du Secrétariat Général de l'AGPAOC.
Conscience et questionnements
Toutes les autorités portuaires partenaires de l’AGPAOC qui ont témoigné lors des premières sessions ont un point commun : elles sont toutes conscientes et ont toutes prises leurs disponibilités pour que la transition climatique et la décarbonation des activités portuaires deviennent des réalités opérationnelles. Que ce soit le Port Autonome de Dakar, celui d’Abidjan ou encore Luanda, Douala et Libreville, les principales initiatives comprennent:
- la réduction de la consommation électrique;
- la maitrise des émissions carbonées; et,
- l’usage progressif des énergies renouvelables
Toutes les autorités confirment qu’elles travaillent à partir d’audits environnementaux et de diagnostics qui éditent des feuilles de route. Cependant, les premiers retours d’expérience des autorités portuaires contributrices marquent deux tendances récurrentes :
- l’absence chronique de moyens financiers pour structurer des programmes et des actions durables qui permettraient d’atteindre les objectifs annoncés dans les audits
- la difficulté de recruter des experts et de former les personnels portuaires en place pour accompagner cette transformation radicale liée aux conséquences de la décarbonation du transport maritime et de la chaine logistique internationale.
Parmi les informations partagées dans les échanges des sessions, plusieurs problématiques sont ressorties:
- Le rôle mais aussi et surtout la responsabilité de l’autorité portuaire dans la transition énergétique des communautés portuaires ouest et centre africaines.
- Les modèles d’affaires liés aux ambitions de décarbonation car toutes les autorités portuaires s’accordent à dénoncer le manque de moyens économiques.
- L’envergure politique et la nécessaire implication des plus hautes sphères des pouvoirs publics pour instaurer des trajectoires nationales en matière de décarbonation.
Plusieurs interventions de la salle ont questionné dans quelle mesure les autorités portuaires membres de l’AGPAOC pouvaient être pro-actives face aux évolutions des bateaux et de leurs approvisionnements énergétiques propres. Aujourd’hui, la conclusion demeure que la plupart des ports membres de l’AGPAOC ne sont pas prêts car les autorités manquent de visibilité pour établir une stratégie efficiente et opérationnelle. L’autre dimension est collective et collaborative car la mutualisation des efforts et des investissements pourrait être plus efficace sous l’égide de l’AGPAOC.
Financement et perspectives
Cette 42ème édition du Conseil Annuel de l’AGPAOC est édifiante face à l’urgence pour les autorités portuaires membres d’anticiper des solutions stratégiques et opérationnelles afin de se conformer aux standards et exigences ratifiés à l’échelle internationale sous l’égide d’agences internationales comme l’OMI. La plupart des autorités portuaires membres sont déjà en action mais de manière trop isolées, manquant de moyens humains, économiques et financiers pour engager des programmes en phase avec les objectifs internationaux attendus. Les autorités portuaires doivent agir en mode communautaire pour conduire des actions diversifiées et complémentaires qui permettront de réduire l’empreinte carbone globale des activités maritimes, portuaires et logistiques des membres de l’AGPAOC
Les collaborations avec les acteurs privés doivent être activées de manière nettement plus claires et ambitieuses.
De façon générale, les intervenants ont particulièrement insisté sur le besoin de suivi des investissements, de la mise en oeuvre de plan stratégique partagés et concertés. De façon transversale, il a été relevé que les opérations portuaires devaient et pouvaient être optimisées afin de réduire les externalités négatives. Enfin, de façon unanime, le rôle positif de l’échange de meilleures pratiques a été relevé par les intervenants mais aussi par le public. Le rôle de l’AGPAOC a alors été mis en avant avec un travail de concertation et de veille sur les meilleurs retours d’expérience en provenance de ports ayant déjà investis dans la transition énergétique.
En résumé, les point suivants peuvent être retenus :
- Comment construire des stratégies convergentes entre acteurs des activités portuaires?
- Comment financer les projets d’investissement liés à la transition énergétique?
- Comment identifier les trajectoires technologiques du futur?
- Comment améliorer les suivis de l’impact des actions mises en oeuvre par les ports?
En guise de conclusion et de messages-clés sur la deuxième journée d’échanges :
- Nécessaire coordination des acteurs portuaires et maritimes de la transition écologique,
- Le rôle clé du financement des investissements nécessaire demeure critique,
- Le besoin d’optimiser les opérations actuelles afin de maximiser dès à présent la réduction des externalités négatives
- Mettre en place des méthodes, normes et standards afin de généraliser des conditions initiales permettant la réalisation de grands projets à l’échelle de l’Afrique de l’ouest et du centre.
Clarifier une feuille de route ouest et centre africaine
Le plus urgent est de clarifier la feuille de route qui pourrait être sensiblement la même pour toutes les autorités portuaires membres de l’AGPAOC afin de rendre intelligible le rôle, les obligations et les responsabilités des ports dans la transition énergétique ouest et centre africaine.
Une cartographie complète doit permettre de comprendre et d’évaluer les conditions actuelles en matière technique et technologique. Elle doit synthétiser les positionnements des clients des ports (armements, manutentionnaires, chargeurs, etc.) en matière de transition énergétique. Elle doit prendre en compte les coûts globaux mais aussi les dividendes directes et indirectes dans une approche à court/moyen/long termes.
Cela doit conduire nécessairement à l’édification d’une stratégie avec des acteurs, des moyens, des objectifs et un calendrier de mise en œuvre. Ce travail s’avère indispensable et prioritaire pour les autorités portuaires de l’AGPAOC mais il exige de la coopération et de la coopération (sous l’égide de l’AGPAOC) et de l’accompagnement (ports partenaires internationaux, bailleurs de fonds, consultations spécialisées internationales, expertises scientifiques et académiques, etc) Enfin, les futures initiatives des autorités portuaires doivent impérativement s‘inscrire dans des politiques publiques nationales et continentales africaines afin de légitimer des changements structurels qui doivent être plus communautaires que portuaires, plus sociétaux que seulement écologiques ou environnementaux.